Variole du singe : à propos de l'épidémie d'orthopoxvirose simienne (infection à virus monkeypox) de 2022

Depuis début mai 2022, une épidémie chez l’homme, sans précédent, due au virus de la variole du singe ("monkeypox" en anglais) est apparue dans le monde. Les premiers cas ont été initialement décrits au Royaume-Uni. Peu de temps après des cas ont aussi été identifiés dans d'autres pays d'Europe, en particulier en France, ainsi qu'en Amérique du Nord, en Amérique du Sud, au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Australie. Depuis, le nombre de personnes concernées n’a cessé de croître. Le 6 juillet 2022, 7146 cas ont été recensés dans 53 pays [1].

En France au 12 juillet 2022, 912 cas ont été identifiés dont 569 en Ile-de-France [2]. Jusqu’alors, ce virus avait été identifié uniquement en Afrique, ou chez des voyageurs de retour de voyage en provenance d’Afrique. Cette épidémie révèle des changements majeurs dans cette zoonose des forêts tropicales humides. Elle a des caractéristiques inédites et fait l'objet d'une surveillance accrue. Les patients occidentaux actuels, n’ont pas fait de voyage récent en Afrique, à l’exception du premier cas, au Royaume-Uni en mai 2022.

La transmission est interhumaine et non pas liée au contact avec un animal. Les patients sont à forte prédominance masculine. Il s’agit pour la grande majorité d’hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, avec des partenaires multiples [3].

Torse d'un patient africain infecté par le virus de la variole du singe

D’où vient le virus de la variole du singe ("monkeypox") ?

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Maladie de la variole du singe : origine, définition, transmission et symptômes

Le virus de la variole du singe (ou orthopoxvirose simienne) a été isolé et identifié pour la première fois en 1958 lorsque des singes expédiés de Singapour vers un centre de recherche au Danemark sont tombés malades. 

L’enquête sur une épidémie d’éruptions vésiculo-pustuleuses généralisées dans cette colonie de singes en captivité au State Serum Institute de Copenhague a alors conduit à l’époque à l’identification de ce virus dans les lésions de ces primates.

Cependant, le premier cas humain confirmé remonte à 1970 lorsque le virus a été isolé chez un enfant de la République Démocratique du Congo (RDC) suspecté d'avoir la variole [4].

Le virus du monkeypox est un orthopoxvirus à ADN. Il est génétiquement proche du virus de la vaccine (virus à ADN bicaténaire de la famille des Poxviridae) et à un moindre degré, de celui de la variole. Il existe deux groupes génomiques distincts dont le pouvoir pathogène est différent. Le virus circule actuellement dans les forêts tropicales humides africaines.

Selon l’OMS (Organisation mondiale de la Santé), plusieurs espèces animales sont sensibles au virus de la variole du singe. Il s’agit notamment des funisciures, des écureuils, des cricétomes des savanes, des loirs, des primates et d’autres encore,....

La transmission de l’animal à l’humain peut résulter d’un contact direct avec du sang, des liquides biologiques (fluides biologiques ou fluides corporels), ou des lésions cutanées, ou muqueuses d’animaux infectés.

Une souche est présente en Afrique de l’Ouest, tandis que l’autre, beaucoup plus agressive pour l’homme, circule dans le centre de l’Afrique. Cette souche dite « du bassin du Congo » est associée à des formes cliniques plus sévères et a une létalité de 10 %. 

Des épidémies chez l’homme ont été documentées dès les années 1980, le Nigeria et la République démocratique du Congo (RDC) étant les pays avec la majorité des cas connus.

En dehors de l'Afrique, tous les cas diagnostiqués jusqu’à l’épidémie actuelle ont été directement liés à un voyage en Afrique, sauf en 2003 aux États-Unis, où des cas ont été attribués à l'importation de chiens de prairie infectés [5].

Comment la variole du singe est-elle apparue en Europe (Espagne, Belgique, France,...) ?

L’origine précise de l’épidémie mondiale actuelle reste pour l’instant inconnue. Il s'agit d'une épidémie avec des chaînes de transmission simultanées. 

Les analyses phylogénétiques (utilisation de séquences de macromolécules biologiques) de l'ensemble des séquences du génome analysé dans un certain nombre de pays suggèrent que les virus en circulation sont étroitement liés les uns aux autres et aux précédentes infections à monkeypox décrites en Afrique de l'Ouest et chez les voyageurs de cette région. 

Les signes cliniques documentés jusqu'à présent révèlent une forme plus bénigne que celle de la maladie en Afrique, avec une éruption variable, touchant souvent les régions ano-génitales (relatif à l'anus et aux organes génitaux).

Au 21 juillet 2022, 5 décès ont été signalés dans le cadre de cette nouvelle épidémie, tous en Afrique.

Quels sont les symptômes de la variole du singe (boutons, fièvre, fatigue, douleurs musculaires,...) ?

En l'état des connaissances, l’éruption vésiculaire est au centre du tableau clinique. Une étude en Grande-Bretagne portant sur 54 personnes malades - toutes s'identifiant comme des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) -, a permis d’analyser les symptômes actuels associés à cette variole du singe.

Au total, l’ensemble de ces patients a signalé de la fatigue ou de la léthargie, 31 (57 %) de la fièvre. Tous présentaient des lésions cutanées ou muqueuses dont 51 (94 %) étaient ano-génitales. 

A noter que 37 (89%) de ces malades avaient des lésions cutanées affectant plus d'un site anatomique et quatre (7%) avaient en plus des lésions oropharyngées. 

Plus de la moitié des patients avait une lymphadénopathie (atteinte inflammatoire des nœuds lymphatiques). Et un sur quatre avait en plus une IST (infections sexuellement transmissibles, comme les infections à gonocoque) concomitante. Cinq des 54 personnes ont dû être hospitalisées, principalement en raison de douleurs ou d’une cellulite bactérienne localisée nécessitant une antibiothérapie [6].

De manière générale, le monkeypox provoque une éruption fébrile spontanément résolutive de gravité limitée. L’infection par le virus de la variole du singe entraîne une éruption, faite de vésicules remplies de liquide qui évoluent vers le dessèchement, la formation de croutes puis la cicatrisation.

Des démangeaisons peuvent y être associées. Les vésicules se concentrent plutôt sur le visage, dans la zone ano-génitale, les paumes des mains et plantes des pieds, mais également sur le tronc et les membres.

S’y associent des maux de tête, une fièvre, une atteinte ganglionnaire, des myalgies, dorsalgies et asthénie. 

L’évolution de la maladie peut être plus grave dans des groupes à risque spécifiques comme chez les enfants, les femmes enceintes ou les personnes immunodéprimées [7].

Cas contaminés : comment diagnostiquer la variole du singe ?

L’examen clinique, les symptômes et le contexte doivent désormais faire évoquer le diagnostic. 

La confirmation de la variole du singe est biologique, par l’identification du virus notamment par test PCR (polymerase chain reaction) spécifique sur des prélèvements, cutanés au niveau des lésions (vésicules, croûtes), ou encore sur des prélèvements naso-pharyngés en cas de poussée éruptive dans la bouche ou la gorge.

Ces prélèvements doivent être faits par du personnel qualifié, dûment protégés, du fait de la contagiosité des patients. Les cas confirmés doivent faire l’objet d’une investigation destinée à déterminer les circonstances les plus probables de leur contamination.

Le contact tracing est assuré par l’ARS qui liste les personnes-contacts à risque d’infection et les contacte pour les informer et leur dispenser des recommandations.

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Contamination : comment se transmet la variole du singe ?

Le virus de la variole du singe peut être transmis par contact direct avec les lésions cutanées ou muqueuses d’une personne malade, ainsi que par ses gouttelettes respiratoires (salive, éternuements, postillons,…).

Les rapports sexuels, avec ou sans pénétration, réunissent les conditions d’une contamination. Le fait d’avoir de multiples partenaires augmente le risque d’être exposé au virus. La contamination peut aussi avoir lieu au contact de l’environnement du malade (literie, vêtements, vaisselle, linge de bain…).

Il est donc important que les malades respectent un isolement pendant toute la durée de la maladie (jusqu’à disparition des dernières croutes, le plus souvent 3 à 4 semaines, après l’apparition des premiers symptômes.

L’infection par le virus de la variole du singe n’est pas connue comme étant une IST, mais le contact direct avec une peau lésée durant un rapport sexuel facilite la transmission.

En Afrique Centrale ou de l’Ouest l’homme peut s’infecter au contact d’animaux, sauvages ou en captivité, morts ou vivants, tels que les rongeurs ou les singes. Mais le virus ne se propage généralement pas facilement entre les personnes, hormis des contacts très rapprochés [8].

Combien de temps dure la variole du singe ?

L’incubation de la maladie peut aller de 5 à 21 jours. La phase de fièvre dure environ 1 à 3 jours. La maladie guérit le plus souvent spontanément, au bout de 2 à 3 semaines, parfois 4 jusqu'à semaines.

Quel traitement contre la variole du singe ?

Le médicament antiviral Tecovirimat (également vendu sous le nom de Tpoxx) est approuvé dans la majeure partie de l'Europe pour le traitement du monkeypox, de la variole et de la cowpox (maladie infectieuse des bovidés ). 

Il est également utilisé pour traiter les complications qui peuvent survenir à la suite de la vaccination contre la variole. Dans des essais expérimentaux, le Tecovirimat a augmenté de manière significative le taux de survie des animaux ayant reçu de très fortes doses de monkeypox.

L’efficacité de Tecovirimat a été évaluée sur la base d’études menées chez des animaux infectés par des doses létales d’orthopoxvirus. Ces études ont montré que le traitement par Tecovirimat pendant 14 jours a considérablement augmenté les taux de survie : lorsque le traitement a débuté 4 ou 5 jours après l’infection, de 80 à 100 % des animaux traités par le Tecovirimat ont survécu. Aucun animal des groupes placebo n’a survécu [9].

Le médicament n’est délivré que sur ordonnance. Il est disponible sous la forme de gélules à prendre par voie orale, la dose dépendant du poids corporel.

Une fois le diagnostic posé, le patient doit s’isoler, avec son propre linge. L’isolement ne sera levé qu’une fois toutes les lésions totalement disparues.

Comment éviter de contracter la variole du singe ?

Deux vaccins, Imvanex et Jynneos, sont disponibles en France, ils sont destinés aux personnes ayant été en contact avec des malades et aux personnes à risque accru. Il s'agit de vaccins contre la variole de troisième génération, produits par l'entreprise danoise de biothechnologie Bavarian Nordicet. Ils disposent d'un protocole d'utilisation établi par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) [10].

La vaccination s'effectue avec deux doses de 0,5 ml, administrées par voie sous-cutanée, et espacées de 28 jours. La Haute Autorité de Santé (HAS) recommande d'administrer idéalement la première dose dans les quatre jours après le contact à risque et au maximum quatorze jours plus tard.

Pour les personnes déjà vaccinées contre la variole dans le passé, une seule dose suffit. S'agissant des personnes immunodéprimées, une troisième dose est conseillée.

Les deux vaccins disponibles sont interchangeables : la seconde dose peut ainsi se faire avec un vaccin différent de la première. Enfin, un espacement des doses de plusieurs semaines peut être envisagé, éventuellement. Le fait d’avoir été vacciné dans l’enfance contre la variole devrait exercer une certaine protection contre la variole du singe. Mais la vaccination systématique a pris fin dans les années 70 en Europe et aux États-Unis.

La Haute Autorité de Santé (HAS) préconise qu’en plus de la vaccination post-exposition, une protection contre le Monkeypox soit proposée aux hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) et aux personnes trans rapportant des partenaires sexuels multiples, ainsi qu’aux personnes en situation de prostitution et aux professionnels des lieux de consommation sexuelle, quel que soit le statut de ces lieux (11). Une ligne téléphonique, "Écoute santé Monkeypox" (« Monkeypox Info service »), joignable au 0 801 90 80 69, ouvrira aussi, 7 jours sur 7, de 8 h à 23 h.

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Combien de cas en France ?

Au 12 juillet 2022, 912 cas ont été confirmés en France. Parmi les personnes infectées, 2 enfants et 4 femmes sont recensés depuis le 7 mai 2022, date du premier cas détecté en France. Tous les autres cas concernent concernent des personnes du sexe masculin.

Au total, 98% des cas pour lesquels l’orientation sexuelle est connue, concernent des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes. Les patients sont âgés de 19 à 71 ans, l’âge médian étant de 35 ans.

Le temps écoulé entre le début des symptômes et le diagnostic est de 6 jours en moyenne [12]. L’infection à monkeypox est une maladie à déclaration obligatoire au même titre que les autres orthopoxviroses.

Véritable problème de santé publique faisant suite à la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19), tout cas suspect dès l'apparition des symptômes doit être signalé sans délai à l’Agence régionale de santé (ARS).

Alerte en cours : l'OMS réagit à propos de l'épidémie de la variole du singe

« L'épidémie se propage rapidement dans le monde en raison d'un nouveau mode de transmission que nous ne comprenons pas très bien » – Tedros Adhanom Ghebreyesus, OMS, juillet 2022.

Tedros Adhanom Ghebreyesus, le directeur général de l'OMS (Organisation mondiale de la Santé), a annoncé le 23 juillet 2022 que l'OMS activait le plus haut niveau d'alerte afin d'enrayer la flambée de l'épidémie de la variole du singe.

Apparue au début du mois de mai 2022 au Royaume-Uni (infection détectée chez un individu de retour du Nigeria), cette maladie infectieuse virale rare a déjà frappé plus de 15 000 personnes dans plus de 70 pays. [13]

Sources

  1. ECDC. Epidemiological update: Monkeypox multi-country outbreak. Summary of epidemiological update as of 15 June. https://www.ecdc.europa.eu/
  2. Santé Publique France point d’information du 13 juillet 2022
  3. Communiqué Académie de Médecine 12/07/2022
  4. New Sci. 2022 28 mai ; 254(3388) : 8–9. doi:  10.1016/S0262-4079(22)00914-9. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/
  5. Chen N., Li G., Liszewski M.K., et al. Virulence differences between monkeypox virus isolates from West Africa and the Congo basin. Virology. 2005 Sep 15;340(1):46–63. doi: 10.1016/j.virol.2005.05.030. PMID: 16023693. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/
  6. Girometti N, Byrne R, Bracchi M, a. Demographic and clinical characteristics of confirmed human monkeypox virus cases in individuals attending a sexual health centre in London, UK: an observational analysis. Lancet Infect Dis. 2022 Jul 1:S1473-3099(22)00411-X. doi: 10.1016/S1473-3099(22)00411-X. https://www.thelancet.com/
  7. WHO suggested outbreak case definition for the multi-country monkeypox outbreak. 
  8. ECDC Interim advice for public health authorities on summer events during the monkeypox outbreak in Europe.
  9. EMEA EMA/44963/2022 EMEA/H/C/005248
  10. Note d’information et protocole d’utilisation pour les professionnels de santé concernant la vaccination contre le Monkeypox virus (26 mai 2022) Vaccins IMVANEX® et JYNNEOS®
  11. Avis n°2022.0039/AC/SESPEV du 7 juillet 2022 du collège de la Haute Autorité de santé relatif à la vaccination contre le virus Monkeypox en pré-exposition des personnes à haut risque d’exposition
  12. Santé Publique France, point d’information du 12/07/2022
  13. Cas de variole du singe : point de situation au 21 juillet 2022. https://www.santepubliquefrance.fr/
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