Dans le cas d'un Brexit dur, où le Royaume-Uni redeviendrait un partenaire commercial hors UE comme les autres. Un rapport estime que le coût global du Brexit pour l'UE approchera les 37 milliards d'euros (hors impacts indirects comme la tarification, les migrations et les taux de change [1].
Le Royaume-Uni est le cinquième client de la France et son huitième fournisseur
Le Royaume-Uni est le cinquième client de la France et son huitième fournisseur
En 2016, la France a exporté 38 milliards d’euros de biens et de services au Royaume-Uni, notamment dans l’agroalimentaire et les biens de consommation, qu’elle a importé environ 32 milliards d’euros, principalement en services financiers et services professionnels.
Après l'Allemagne et la Hollande, la France arrive en troisième place des pays concernés par les « dommages collatéraux », avec un coût annuel de quatre milliards d'euros.
Les secteurs de l’agroalimentaire, des biens de consommation, les industries automobile, chimique et aérospatiale, ainsi que les biens industriels sont les filières les plus atteintes, mais la santé et les sciences du vivant sont également concernées.
Pour les sciences du vivant, l’estimation de l’impact des barrières tarifaires et non-tarifaires s’élève à environ 2 % de la valeur ajoutée brute, qui approche 150 milliards d’euros annuels [2]. L’identification des filières et des régions les plus touchées est indispensable pour mettre en place une stratégie opérationnelle afin de préserver l’équilibre de l’outil de production, mais aussi de répercuter au mieux les hausses de prix sur la consommation des ménages et sur les investissements des entreprises. L’arrivée massive des personnels employés auparavant au Royaume-Uni risque de modifier significativement le paysage et l’offre de soins en France [3].
Pour les entreprises pharmaceutiques, les impacts sont plus difficiles à estimer [4]. Les britanniques ont accès à des financements européens (Horizon 2020, Fonds européen d'investissement) à hauteur de 16 %, alors que la contribution du Royaume-Uni à ce même fond européen est 11,5 % [5].
Actuellement, les sociétés pharmaceutiques investissent 16 % de leurs dépenses européennes de recherche et développement au Royaume-Uni, alors que celui-ci représente 9 % des parts de marché. Enfin, les investissements dans les sciences du vivant en Grande Bretagne venant de pays hors UE (États-Unis, Japon), ont parfois permis à ces pays d'accéder au Marché européen. Il y a actuellement 2 400 demandes d’autorisation de mises sur le marché qui ouvriront l’accès au marché européen avant mars 2019 [6]. Il y a également plus de 1 500 essais cliniques en cours au Royaume-Uni, dont l'attractivité risque de changer.
Si l’on peut raisonnablement penser que les barrières douanières vont modifier l’accès de l’industrie pharmaceutique aux plateformes de recherche clinique du Royaume-Uni, il ne faut pas sous-estimer l’offre grandissante des pays émergents en termes d’essais thérapeutiques. L’apparition récente de plateformes de recherche clinique, en Russie, en Chine et en Inde notamment [7], permet un accès à de très importantes cohortes de patients [8], au prix d’une démarche qualité parfois rudimentaire [9], dont les résultats peuvent être difficiles à interpréter, et dont les conséquences pour la qualité des médicaments ne sont pas bien connues à ce jour.
Bien que la régulation des systèmes de santé des pays membres ne fasse pas l’objet de directives européennes contraignantes, le Brexit est porteur de risques inédits pour la filière santé européenne.
Certains de ces risques, notamment ceux qui sont liés au système assurantiel, peuvent trouver une réponse réglementaire et législative au niveau de chaque état.
D’autres risques sont plus difficiles à appréhender pour les états, notamment en raison d’une dynamique de délocalisation des essais cliniques très active à l'échelle mondiale, mais aussi en raison du déséquilibre induit dans les modes de protection sociale.
Labrousse A. Nouvelle économie du développement et essais cliniques randomisés : une mise en perspective d’un outil de preuve et de gouvernement. Revue de la régulation. Capitalisme, institutions, pouvoir. 2010. https://journals.openedition.org/regulation/7818