Arrêt cardiaque : causes, symptômes, prévention et nouveautés

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Au classement des urgences médicales, l’arrêt cardiaque inopiné représente l’urgence la plus absolue qui soit. Chaque année en France, il existe environ 40 000 cas d’arrêt cardiaque inopiné [1].

Cette pathologie est grevée d’une mortalité estimée autour de 90% [2]. Elle touche deux fois plus les hommes que les femmes avec un âge moyen estimé à 60 ans. La survie de ces patients est extrêmement dépendante des conditions dans lesquelles se déroule l’évènement, de la présence de témoins sur place et de la formation aux gestes et aux soins d’urgence de ces témoins.

La prise en charge d’un arrêt cardiaque extra hospitalier diffère selon le pays. Aux États-Unis, une stratégie dite de « scoop and run » consistant en un transfert non médicalisé en urgence vers un centre hospitalier est préconisée. En France, et plus généralement en Europe, la médication des secours en pré hospitalier impose une stratégie qui peut être nommée « stay and play », consistant en un diagnostic et une prise en charge spécialisée pour orienter le patient vers le centre de référence.

Patient pris en charge par des urgentistes

Quelle est la différence entre crise cardiaque, arrêt cardiaque, arrêt cardio respiratoire, malaise cardiaque, mort subite,... ?

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L’arrêt cardiaque est défini par un arrêt de la circulation du sang dans l’organisme et de la ventilation.

Selon les auteurs et les traductions, il est appelé : arrêt cardiaque, arrêt cardiorespiratoire ou arrêt cardiocirculatoire (ACR) .

En pratique, un patient est en arrêt cardiaque lorsqu’il est inconscient, ne bouge pas, ne répond pas à l’appel, ne respire pas ou présente des gasps (respiration anarchique lente inefficace). Les gasps ne doivent pas être confondus avec des mouvements respiratoires au risque de faire méconnaitre l’arrêt cardiorespiratoire. Les gasps ont la même signification que l’arrêt respiratoire. L’absence de pouls ne doit pas être recherchée.


La mort subite se différencie de l’arrêt cardiaque par son caractère inattendu et l’absence de cause extra cardiaque retrouvée. Un arrêt cardiaque soudain ou inopiné non récupéré après des manœuvres de réanimation, chez un patient ne présentant pas de pathologie en phase terminale, est appelé une mort subite.

Ces termes ne doivent pas être confondus avec la notion de crise cardiaque. En France, le terme de crise cardiaque est largement employé pour décrire un infarctus du myocarde. L’infarctus du myocarde entraine une ischémie du cœur par occlusion d’une artère coronaire. A ces définitions, se rajoute l’entité nosologique « syndrome coronarien aigu » qui inclut :

  • L’angor instable (le vaisseau n’est pas occlue en totalité et il n’y a pas de souffrance myocardique en aval de la lésion donc pas d’élévation des marqueurs biologiques de type troponine) ;
  • L’infarctus du myocarde sans sus décalage du segment ST à l’électrocardiogramme (NSTEMI non - ST elevation myocardial infarction) qui correspond à une occlusion partielle du vaisseau qui engendre une souffrance musculaire sous-jacente (élévation de la troponine) ;
  • L’infarctus du myocarde avec sus décalage du segment ST à l’électrocardiogramme (STEMI ST elevation myocardial infarction) qui provoque une nécrose du cœur plus ou moins avec une étendue secondaire à une occlusion complète d’une artère coronaire.

Quelles sont les causes d'une crise cardiaque et d’un arrêt cardiaque ?

La crise cardiaque, ou l’infarctus du myocarde, est secondaire à une occlusion partielle ou totale d’une artère coronaire.

Les facteurs de risques cardiovasculaires (cholestérol, surpoids, hypertension artérielle, diabète, tabagisme, âge, sexe masculin) contribuent à la formation de plaques d’athérome qui vont se déposer (par un mécanisme complexe de remaniement inflammatoire) sur la paroi interne (intima) des artères coronaires.

Ce phénomène est appelé athérosclérose. Lorsque la plaque se rompt, elle entraine une lésion de l’intima qui va secondairement provoquer l’afflux de facteurs de coagulation jusqu’à une thrombose incomplète (NSTEMI) ou complète de l’artère (STEMI).

L’arrêt cardiaque correspond à un arrêt du rôle de pompe qui propulse le sang du cœur vers le reste du corps. L’arrêt de la circulation du sang peut être secondaire à une occlusion complète d’une artère coronaire (STEMI), entrainant ainsi soit une asystolie soit un trouble du rythme cardiaque grave (tachycardie ventriculaire ou fibrillation ventriculaire) qui empêche la contraction du cœur.

En dehors de la maladie athérosclérotique touchant principalement les patients avec facteurs de risque cardiovasculaire et âgés de plus de 50 ans, les études concernant les arrêts cardiaques des patients jeunes (moins de 45 ans) retrouvent comme facteurs de risques : une maladie cardiaque sous-jacente dans ¼ des cas (cardiomyopathie dilatée, dysplasie arythmogène du ventricule droit, cardiomyopathie hypertrophique) et autres causes dans ½ des cas (myocardite, maladie valvulaire, insuffisance cardiaque, cardiomyopathie secondaire à une hypertension, sarcoïdose ou maladie coronarienne, QT long, syndrome de Brugada).

A noter que la consommation de toxiques (alcool, opioïdes, inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine, cocaïne, antagonistes dopaminergiques) a été retrouvée dans 30% des cas d’arrêt cardiaque chez les patients de moins de 45 ans. Il est important de retenir que les facteurs de risques cardiovasculaires sont présents chez près de 70% des patients jeunes (moins de 45 ans) atteints d’un arrêt cardiaque. Dans 20% des cas, un trouble psychiatrique préexistant est retrouvé [3]. Les causes non cardiovasculaires représentent environ 20% des arrêts cardiaques.

Symptômes : quel est le premier signe d'une crise cardiaque ou d’un arrêt cardiaque ?

Comme nous l’avons vu précédemment, la crise cardiaque ou l’arrêt cardiaque sont le plus souvent secondaires à une occlusion d’une artère coronaire. Lorsqu’un arrêt de la circulation sanguine se produit, le cœur est privé d’oxygène et donc se nécrose. Le symptôme le plus fréquent est la douleur thoracique (75% des cas) [4].

L’apparition des symptômes est le plus souvent brutale. Lorsqu’elle est typique, la douleur est rétrosternale, en barre, constrictive, intense, irradiant dans les avant-bras, la mâchoire ou le dos.

Le reste de l’examen clinique est le plus souvent parfaitement normal. Il est important de comprendre que la présentation peut être atypique. Les manifestations peuvent être nombreuses. Elles peuvent prendre la forme d’une dyspnée (environ 45% des cas) isolée ou associée à une douleur thoracique [4], d’une douleur abdominale épigastrique, de l’absence de douleur notamment chez le patient diabétique ou de perte de connaissance brève (syncope à l’emporte-pièce). A noter que des signes avant-coureurs de douleur thoracique à l’effort sont présents dans l’angor stable.

Comment meurt-on d'un arrêt cardiaque ?

L’absence d’activité mécanique efficace du cœur provoque l’arrêt cardiaque. Les impulsions électriques sont enregistrées lors d’un électrocardiogramme. Le rythme peut être choquable (éligible à une défibrillation) ou non choquable.

Les rythmes choquables sont :

  • La fibrillation ventriculaire (fréquence cardiaque irrégulière) ;
  • La tachycardie ventriculaire (fréquence cardiaque régulière qui peut entrainer un arrêt cardiaque lorsque le rythme est très rapide ou qu’il existe une cardiopathie sous-jacente).

Les rythmes non choquables sont :

  • L’asystolie (absence complète de rythme) ;
  • La dissociation électromécanique (rythme cardiaque présent mais absence de pouls typiquement dans l’embolie pulmonaire ou la dissection aortique) ;
  • Trouble de la conduction de haut degré.

Le rythme cardiaque choquable est de meilleur pronostic que le rythme non choquable.

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Quels médicaments peuvent provoquer un arrêt cardiaque ?

Les médicaments pouvant être l’objet de complications gravissimes de type arrêt cardiaque sont retrouvés dans différentes classes. Un surdosage en dérivés morphiniques (pupilles en myosis serré) ou en benzodiazépines peut entrainer un coma puis un arrêt respiratoire.

Certains médicaments ont une toxicité cardiaque directe comme les antidépresseurs (tricycliques (notamment l’amitriptyline, les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine), les antihypertenseurs (bêtabloquants, inhibiteurs calciques), les antipsychotiques (lithium), les antiarythmiques de classe I (flécaine, amiodarone) et IV (inhibiteur de l’enzyme de conversion), les digitaliques ou la quinine [5].

Que faire en cas d'arrêt cardiaque ?

La prise en charge d’un arrêt cardiaque repose sur le principe de la chaine de survie.

Ce concept de chaine de survie a été développé dans les années 1990 par le Docteur Cummins [6]. La chaine de survie est composée de 6 maillons successifs comme schématisés par l’American Heart Association.


Figure 1 :

Concept de la chaîne de survie

 

  • Le maillon 1 correspond à l’appel à l’aide (appel du SAMU (15) ou des pompiers (18)). 
Le maillon 2 correspond à la réanimation cardiopulmonaire précoce de la victime avec le massage cardiaque externe (à une fréquence de 100 à 120/mn). Une nouvelle fois, l’absence de pouls ne doit pas être recherchée.
  • Le maillon 3 correspond à la défibrillation en cas de rythme cardiaque choquable. Cette procédure doit être la plus précoce possible. Elle est largement facilitée par la distribution sur le territoire des défibrillateurs automatisés externes.
  • Le maillon 4 correspond aux manœuvres de réanimation cardiopulmonaire spécialisée au sein d’un service de réanimation.
  • Le maillon 5 correspond à la prise en charge post arrêt cardiaque avec un contrôle thermique optimal, le traitement des défaillances d’organes vitaux le cas échéant et la prévention des récidives précoces.
  • Le maillon 6 correspond à l’accompagnement du patient après l’arrêt cardiaque avec la rééducation, la kinésithérapie, la réinsertion sociale et professionnelle et prise en charge du handicap.

Comment se déroule la prise en charge après un arrêt cardiaque (massage cardiaque,...) ?

La prise en charge d’un arrêt cardiaque débute au moment du diagnostic de l’arrêt cardiaque.

Un patient qui ne bouge pas, ne respire pas, ne répond pas à son nom doit bénéficier d’un massage cardiaque externe en urgence. Le massage cardiaque, débuté par les témoins, consiste à positionner les deux mains au niveau du sternum du patient pour réaliser une dépression thoracique sur 5 à 6 cm.

Les mains doivent se décoller du thorax après chaque dépression. L’insufflation (bouche-à-bouche) n’est actuellement plus recommandée en systématique mais peut être procurée si les sauveteurs sont en nombre suffisant (2 insufflations toutes les 30 dépressions). La mise en place d’un défibrillateur en urgence permet de multiplier par 4 à 5 les chances de survie [7].

La prise en charge par le SMUR (structure mobile d’urgence et de réanimation) consiste à confirmer le diagnostic, poursuivre la réanimation cardiopulmonaire, procéder à une intubation orotrachéale pour sécuriser les voies aériennes et apporter de l’oxygène en continu ainsi qu’à administrer les traitements adaptés à la cause de l’arrêt cardiaque.

Le patient est ensuite transféré dans un centre hospitalier pour réalisation d’une coronarographie s’il existe des arguments pour une occlusion d’une artère coronaire ou vers un service de réanimation pour poursuivre les explorations.

Comment prévenir un arrêt cardiaque (hygiène de vie, activités de la vie quotidienne...) ?

Comme nous l’avons vu précédemment, la maladie athérosclérotique est la principale cause d’infarctus.

Afin de réduire le risque d’arrêt cardiaque, le respect des règles d’une bonne hygiène de vie est indispensable.

Les habitudes de vie doivent consister en une activité sportive régulière, la consommation de fruits et légumes, l’arrêt du tabac et l’observance des traitements antihypertenseurs pour lutter contre une pression artérielle élevée.

Les facteurs de risques cardiovasculaires sont modifiables et méritent donc un travail quotidien visant à les combattre.

Les nouveautés dans la prise en charge de l'arrêt cardiaque

La prise en charge de l’arrêt cardiaque au cours des dernières années a été modifiée faiblement.

Deux évolutions récentes méritent cependant un intérêt particulier. Tout d’abord, l’accès plus facile aux défibrillateurs automatisés externes devrait permettre au cours des années futures d’améliorer le pronostic des arrêts cardiaques.

Afin de faciliter l’accès à cette thérapeutique, de nombreuses entreprises travaillent sur l’envoi de DAE par un drone en quelques minutes dans les régions reculées.

Deuxièmement, les études sur la mise en place d’une circulation extra corporelle (Extra corporeal life support : ECLS) retrouvent des taux de survie jusqu’à 40% [8] dans le cadre d’un arrêt cardiaque réfractaire.

Cette thérapeutique d’exception est à l’heure actuelle réservée à certains patients très sélectionnés (âge inférieur à 60 ans, durée de réanimation inférieure à 60 minutes, rythme choquable initial).



Sources

  1. Gueugniaud P-Y, Bertrand C, Savary D, Hubert H. [Cardiac arrest in France: Why a national register?]. Presse Med 2011;40:634–8. https://doi.org/10.1016/j.lpm.2011.02.026
  2. Daya MR, Schmicker RH, Zive DM, Rea TD, Nichol G, Buick JE, et al. Out-of-hospital cardiac arrest survival improving over time: Results from the Resuscitation Outcomes Consortium (ROC). Resuscitation 2015;91:108–15. https://doi.org/10.1016/j.resuscitation.2015.02.003
  3. Allan KS, Morrison LJ, Pinter A, Tu JV, Dorian P, Rescu Investigators. Unexpected High Prevalence of Cardiovascular Disease Risk Factors and Psychiatric Disease Among Young People With Sudden Cardiac Arrest. J Am Heart Assoc 2019;8:e010330. https://doi.org/10.1161/JAHA.118.010330
  4. Bhatt DL, Lopes RD, Harrington RA. Diagnosis and Treatment of Acute Coronary Syndromes: A Review. JAMA 2022;327:662–75. https://doi.org/10.1001/jama.2022.0358
  5. Mégarbane B, Baud F. [Acute poisoning: general management and main causes]. Rev Prat 2006;56:1603–13.
  6. Cummins RO, Ornato JP, Thies WH, Pepe PE. Improving survival from sudden cardiac arrest: the “chain of survival” concept. A statement for health professionals from the Advanced Cardiac Life Support Subcommittee and the Emergency Cardiac Care Committee, American Heart Association. Circulation 1991;83:1832–47. https://doi.org/10.1161/01.cir.83.5.1832
  7. Fleischhackl R, Roessler B, Domanovits H, Singer F, Fleischhackl S, Foitik G, et al. Results from Austria’s nationwide public access defibrillation (ANPAD) programme collected over 2 years. Resuscitation 2008;77:195–200. https://doi.org/10.1016/j.resuscitation.2007.11.019
  8. Yannopoulos D, Bartos J, Raveendran G, Walser E, Connett J, Murray TA, et al. Advanced reperfusion strategies for patients with out-of-hospital cardiac arrest and refractory ventricular fibrillation (ARREST): a phase 2, single centre, open-label, randomised controlled trial. The Lancet 2020;396:1807–16. https://doi.org/10.1016/S0140-6736(20)32338-2
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